Je ne connaissais pas Jean-Pierre Filiu, mais il est visiblement spécialiste du Moyen-Orient et de ses relations avec les Etats-Unis. Je connaissais par contre David B., dessinateur de BD marquant par son trait fort, ses noirs et blancs très contrastés et ses mises en image très chargées et autonomes. Ils sont ici tous deux associés pour retracer sous forme de BD l’histoire des relations entre les Etats-Unis et le Moyen-Orient (ce n’est que la première partie, ceci dit, on s’arrête en 1953). Sujet aride a priori, et pourtant passionnant quand il est comme ainsi bien raconté tant les rebondissements sont nombreux et inattendus, tant la matière est riche. En effet, on en remonte aux pirates de barbarie, et ce à raison, puisque ces relations vont se nouer très tôt et de très loin. Puis elles vont se compliquer avec les questions pétrolières et géopolitiques modernes. Le contenu est donc traité de manière très efficace et convaincante, avec une simplicité (relative, c’est quand même un sacré bordel, quoiqu’on fasse) qui fonctionne bien sous forme BD. Et le trait de David B. est à mon sens parfaitement adapté. En effet, il rend forts même les temps les moins spectaculaires grace à des mises en scène baroque qui font de certaines planches de vrais tableaux. Des tableaux chargés avec des noirs très présents, hein, pas des aquarelles, mais des tableaux tout de même. Et avec les moustacches, les bateaux et les visuels du Moyen-Orient, David B. se fait particulièrement plaisir. Au final, donc, une BD très riche, qui si elle n’est pas destinée à se distraire, permet d’aborder une tranche d’histoire passionnante et toujours importante aujourd’hui de belle et agréable manière.