
La science-fiction de l’âge d’or, des années soixante, on se dit qu’on connaît, et puis on se rend compte qu’on connaît surtout la SF américaine (et européenne, par rebond). Les frères Strugatsky, c’est de la SF soviétique, et ils méritent leur place dans cette collection des œuvres maîtresses de la SF, je vous le dis dès le premier essai. Ici, il s’agit de SF ethno-politique, et pas techno-pioupiou-lasers. Un envoyé de la Terre, avancée technologiquement mais surtout culturellement (le communisme est pleinement réalisé), est infiltré dans la société d’une autre planète humaine, dans un contexte de renaissance environ, tendance hispanisante (des Dons avec des épées et une inquisition à portée de main). Et cette société vire au fascisme. C’est un problème, à deux titres. D’abord, ça ne colle pas du tout aux théories matérialistes solides et validées de la Terre. Et ensuite, c’est insupportable pour le personnage principal, pour qui la défense de l’humain et de son plein développement est primordial, dont tuer des érudits est insupportable. Thématiquement, j’adore. Et ça m’a fait du bien en termes de valeurs et de cadrage général. Ce regard humaniste et communiste se retrouve partout par petites touches, et est défendu comme l’horizon incontestable de l’humain, c’est réjouissant. Et ça se traduit à de petits endroits, aussi, notamment sur la question, très annexe dans le récit, des relations amoureuses. Le récit est rythmé, c’est écrit d’une manière qui me plait beaucoup, et qui est rythmée et pleine d’esprit (genre, pas comme beaucoup de SF tradi de l’age d’or). C’est fin, prenant et profond. Pour une première découverte, je suis franchement conquis par les frères Strugatsky.