Voici le livre qui va me faire remettre la tête dans la conception de jeu et dans l’actualité du jeu, ce qui n’est pas un mince exploit. Avec tout ce que je me suis envoyé comme livres sur le jeu, son histoire et sa théorisation, j’avais un peu l’impression d’avoir fait le tour et je n’avais pas la motivation de me spécialiser plus sur les aspects techniques de la conception. Dans la première partie, qui fait les deux premiers tiers (200 pages), Henri Kermarrec fait une synthèse efficace et sélective de la littérature sur l’histoire et les théories autour du jeu. avec donc des choix thématiques, et des impasses, que je trouve tous justifiés et malins. Franchement, il n’y avait jusque là pas d’ouvrage accessible et aussi court qui reprenait tout ça, et c’est déjà franchement cool et très bien fait. Mais c’est juste une mise en jambe. Parce que le truc vraiment brillant et enthousiasmant, c’est la dernière partie : une approche politique du jeu et de ses usages. Mais comme ça fait plaisir ! Henri KErmarrec analyse avec brio les usages politiques du jeu, dans des registres différents, et avec une connaissance et une finesse politique que jai vraiment appréciées (ok, le fait d’être dans les mêmes tendances politiques aide, évidemment (c’est pas par hasard qu’il y a des auteurs qu’on rencontre dans l’arrière-salle de La Gryffe ;)). Sur la base de cette analyse politique, il brosse des perspectives d’un usage du jeu volontairement politique. Donc de sortir le jeu du registre unique du loisir sans propos et de la satisfaction du plaisir du joueur. Pour en faire un medium culturel comme les autres, qui peut donc faire des propositions sérieuses, tristes, traumatisantes, bref, des usages qui portent un propos réel et solide. Et inattendu aussi. C’est très motivant et très intriguant. Et pour le même prix, il donne des pistes, des exemples et plein de directions à explorer. Franchement, je n’attendais pas une aussi bonne surprise, et je suis aussi ravi que motivé des perspectives que ça ouvre. Bravo !