Rodney Saint-Eloi est né en Haïti, et Yara El-Ghadban est d’origine palestinienne. Les deux ont émigré au Québec, les deux écrivent en français et en ont fait leur métier. Ici, ielles ne se lancent pas dans une œuvre littéraire, mais dans un dialogue sur le racisme. Sur leur parcours, sur leur vécu concret de racisme, aussi bien à grande échelle qu’à petite échelle. Et en ce qui me concerne, ce sont les exemples de micro-agressions quotidiennes et répétées qui m’ont le plus marqué. Parce qu’elles donnent chair au vécu de domination, et sans doute aussi parce qu’elles sont décrites et écrites avec brio. En fait, ce que je disais précédemment est assez faux : c’est une œuvre littéraire autant qu’un essai. Parce que c’est un essai écrit par deux auteurices de talent, et ça joue. Le propos ne s’arrête cependant pas à un partage d’expérience, c’est aussi une prise de hauteur et une invitation au dialogue, en particulier avec des blanc-hes. Ce n’est pas qu’ielles ne soient pas en colère, mais ce n’est pas ce qu’ielles font vivre en priorité aux lecteurices. C’est un essai en forme de dialogue qui fait ouvrir les yeux de manière fine et détaillée, de manière très humaine finalement, très courageuse et très ouverte, mais certainement pas de manière moralisatrice ou simpliste. C’est un beau texte pour se sentir plus et mieux concerné-es par le racisme, et ​ être convaincu-e de ses effets permanents sur tout le monde. Bref, si ce n’est la couverture, c(est vraiment très bien.