Un premier roman, d’une autrice française croisée en bonne compagnie sur un salon : je me suis laissé tenter. Et je suis content d’avoir essayé. On est dans le champ de la SF, mais de la SF post-apocalyptique et politique. Le monde est parti en sucette, et une série de villes ont réussi à se maintenir en construisant une société très hiérarchisée et se voulant utopique, avec comme fondation un livre de grands principes politiques bénéfiques. Et trois ordres : des dirigeants intellos, des militaires, et un peuple laborieux. La promesse étant que chacun-e, à l’issue d’épreuves dans sa jeunesse, accède à sa meilleure place. Vous vous doutez : ça a bien dévié, la société est devenue injuste, avec en plus des aflfux de réfugié-es pas blanc-hes, et on est au seuil d’un coup d’état fasciste. Donc oui, c’est de la fiction politique, et anti-fasciste. Et ce que j’ai apprécié, c’est que c’est d’abord de la fiction : il y a des personnages, avec de la profondeur, un monde suffisamment développé pour avoir de la chair et de la crédibilité, et des intrigues qui ne sont pas là pour faire la morale ou servir un propos simpliste. De vraies histoires de personnages complexes dans un monde crade et complexe (oui, on met le nez dans des rapports de classe et de sexe parfois dégueu), sur fond de pensée politique anti-fasciste. Autant dire que tout ça me va très bien. L’élément qui m’a un peu freiné, tout le long, c’est l’écriture. Non qu’elle ne soit pas travaillée : au contraire. Trop sans doute pour mon goût. Il y a trop de style, avec des phrases immenses et des accumulations de métaphores, d’images et de descriptions. Beaucoup. Ce qui fait que d’une part je m’y perds parfois, et surtout que j’ai tendance à fatiguer parce que ça n’avance pas vite. Ce qui explique par ailleurs la taille du volume. Au final, c’est vraiment une question de goût, et je ne peux pas contester que ça fait aussi la profondeur et les personnages, mais pour moi, il en aurait fallu franchement moins. Si vous aimez les grandes phrases et les registres littéraires travaillés et plutôt classiques, je pense que ça peut être un atout par contre. Et pour autant, j’ai lu avec envie jusqu’au bout du fait de l’histoire et des personnages.