
J’essaie de finir ce livre depuis six mois, et je n’y arrive pas. La fin de l’année arrivant, j’en conclus qu’il est temps d’arrêter de m’acharner. A regret, parce que ce n’est pas du tout un mauvais livre. Jo Güstin est noire, autrice, humoriste, et installée en France depuis seize ans. Ce qu’elle entreprend de raconter ici, c’est l’ensemble de difficultés concrètes et quotidiennes pour être acceptée en France et y trouver une place alors qu’on est noire. Et qu’on est, dans son cas, brillante scolairement et astucieuse socialement, ce qui permet accessoirement de montrer à quel point ce n’est pas une question de mérite et d’efforts personnels. Le fond est donc largement politique, et en particulier anti-raciste, tout en étant profondément incarné. Ce qui donne donc un éclairage extrêmement utile et documenté, sur des enjeux que je pense essentiels. Et pour autant, moi, je ne vais pas réussir à la finir. Mais c’est pour des questions de forme, pas de fond. La forme est un mélange hybride entre le roman, l’essai et l’autobiographie. Avec une personnage principale qui ressemble à l’autrice et qui essaie d’écrire un essai sur la condition des noires en France en interviewant amies et connaissances. Une construction en poupées russes, donc. Et je bloque, parce que je n’arrive pas à plonger dans la narration, qui est très interrompue et mise en perspective, et très découpée, et que je n’arrive pas non plus à y entrer comme dans un essai parce que le contenu est dispersé et étalé. Je pense que c’est un format qui peut fonctionner avec beaucoup de gens, parce que justement c’est un mélange riche mais pas impressionnant (et écrit de manière simple et vivante). Bêtement, avec mon goût pour les essais denses d’un côté et les romans rapides de l’autre, ben je ne m’y retrouve pas. Et pourtant, je vous encourage à y jeter un œil si le sujet et le format peuvent vous parler.