
De quoi la gouvernance est-elle le nom ? Qu’est-ce qu’on essaie de nous vendre avec ce terme récent qui vient remplacer la politique, la démocratie, les rapports de force et tout ce qui faisait la pensée du champ collectif ? La réponse, elle est pas très compliquée : on cherche à nous rendre naturel et incontournable le néolibéralisme. Jusque là, facile. Ce que Alain Deneault entreprend est un peu plus ambitieux : lister toutes les manières dont ce concept de gouvernance vient impacter notre pensée, notre culture politique partagée, nos fonctionnements institutionnels et nos méthodes. Vaste programme, qui ne peut que se confondre avec une critique générale du néolibéralisme. C’est la première limite que j’ai trouvée à ce livre : je suis globalement d’accord avec ce qu’il développe, et je trouve de nombreuses analyses et exemples utiles et éclairants, mais je trouve que ça ne parle pas forcément spécifiquement de gouvernance (vous m’opposerez aisément que la gouvernance n’a rien de spécifique, que c’est un concept flou par dessein, et vous aurez raison, mais je maintiens que ça ne rends pas la compréhension de ce livre bien claire). La seconde limite, c’est que tout ceci est déroulé sous forme de 50 prémisses. Qui sont de courts chapitres. Court, c’est vraiment bien en termes de confort de lecture. Mais par contre, ça manque de liant, de propos structurant et synthétique, ça fait un peu trop liste. Au-delà de ces limites, c’est vraiment plein d’analyses fines et dans des domaines variés (avec une couleur québecoise dépaysante), présenté de manière argumentée et documentée. J’en sors avec plein de bouts à reprendre et à trier, mais donc plus l’impression d’avoir accumulé des morceaux qu’il va falloir travailler que d’avoir profité d’un apport structurant et clair.