
Oui, je suis le genre de gars qui lit des dictionnaires, et qui en plus va vous dire que ça vaut le coup… Bon, en vrai, je pense que pour la plupart des gens, c’est plus adapté pour feuilleter, mais c’est quand même infiniment plus lisible que la plupart des dictionnaires. L’idée n’est pas seulement de lister plein d’émotions pour les définir, mais de faire de la vulgarisation sur l’histoire sociale et intellectuelle des émotions, de leur prise en compte et de la manière de les nommer. Pour les grandes émotions, les plus connues par chez nous, c’est déjà un boulot passionnant que de se rendre compte que certaines ont vraiment changé de définition, et surtout que leur statut a dans tous les cas largement évolué : positives ou négatives, à assumer ou non, méritant une littérature abondante ou non, tout ça change selon l’époque et le contexte. Je trouve ça passionnant non seulement dans ce que ça permet de compréhension de soi, mais surtout de l’inscrire dans le contexte social et culturel et pas comme un absolu immuable. Par la bande, c’est aussi l’occasion de questionner des éléments de définition (sentiments, émotions, intentions) et d’universalité. Et en parlant d’universalité, si la base est occidentale dans l’intitulé des émotions et leur histoire, on ne s’arrête pas là. Nos émotions de référence sont aussi abordées dans leurs variations dans d’autres régions, mais surtout, il y a un tas d’émotions que nous ne reconnaissons pas spécifiquement qui sont introduites dans ce dictionnaire, de toutes les cultures du monde. Et là aussi c’est passionnant : pour ce que ça montre de manières de penser différentes et pour ce que ça ajoute de nuances et de vocabulaire utilisable. C’est un bouquin que j’ai beaucoup aimé et qui fait un double boulot : une transmission de contenus de recherche sur l’histoire des émotions, et une ressource pour augmenter son vocabulaire émotionnel et sa finesse (sans passer par un lecture de type self-help). Un vrai bel équilibre réussi, et qui plus est avec une écriture très agréable, qui se lit donc très plaisamment en butinant entrée par entrée (elles ne sont pas longues, mais elles sont nombreuses).