Quand on parle Commune, on pense tout de suite à la Commune de Paris (à raison, pensons-y), et éventuellement à ses cousines dans quelques autres villes françaises. Kristin Ross propose intelligemment de regarder la forme que dessine ces communes et de la considérer plus largement. Non pas comme un modèle à reproduire, mais comme une stratégie d’émancipation et de lutte politique spécifique qu’on peut retrouver à d’autres moments et d’autres endroits. Une forme qui tient à la constitution d’une entité collective ancrée quelque part et qui se donne comme modalité de vivre différemment, immédiatement, là, de manière auto-organisée, collective et autonome. Et une forme qui n’est pas un modèle puisqu’elle est fluide et spécifique à chaque contexte. C’est un regard que je trouve très intéressant, et elle va sur cette base passer en revue un certain nombre d’autres émergences de ce type. Notamment certaines que je ne connaissais pas du tout et que j’ai trouvées aussi réjouissantes que passionnantes (vous aviez entendu parler de la Commune de Nantes en 1968 ? Ben ça mérite d’y jeter un œil). Et bien sûr en proposer une lecture politique et stratégique pour alimenter la réflexion sur les formes de lutte et de positionnement politique, dans une perspective actuelle et opérationnelle. C’est d’abord un bouquin destiné à réfléchir et à enrichir son regard politique et historique, ce n’est en rien un programme ou des recommandations. Et elle s’appuie sur des références nombreuses, mais en les mobilisant d’une manière accessible et raisonnablement agréable à lire. Pour quelqu’un comme moi, curieux de continuer à m’alimenter autour de ces questions, c’est agréable et riche, et surtout c’est motivant pour continuer à se dire qu’il y a des choses faisables, même à des échelles pas démesurées, qui sont cohérentes en termes de valeurs et de méthodes, et qui ont donné et peuvent donner des résultats probants, avec un impact culturel mais aussi matériel.