Triboulet était bouffon royal, de Louis XII puis de François Ier. Difforme, il fit de la place de bouffon un espace de transgression et de moqueries offensant tous les puissants de la cour. Son sens de la répartie et ses saillies lui ont valu une place dans les livres d’histoire. Ce n’est d’ailleurs pas le premier roman qui lui est consacré. Mais celui-ci est écrit par un autre bouffon, ce qui lui donne un sens et un intérêt supplémentaire. Guillaume Maurice prête en effet à Triboulet des réflexions philosophiques sur la force du rire et surtout sur sa relation au pouvoir. Le rire est transgressif et irrévérencieux, c’est une arme contre les puissants, mais l’ est-ce encore quand il est accepté voire cautionné par le pouvoir. N’en devient-il pas alors le serviteur, qu’il le veuille ou non ? C’est le fil rouge de ce roman qui pour le reste est un vrai récit, prenant et vif, de la vie de Triboulet, et donc aussi en partie des rois et de leur cour. C’est très agréable à lire, rythmé de réparties réussies, et souvent touchant. L’équilibre est bon et fluide entre histoire, émotions et pensées philosophiques (si ce n’est, chipotons, un court passage avec Machiavel que j’ai trouvé artificiel). Une lecture plaisante, rapide et astucieuse par laquelle vous pouvez tranquillement vous laisser tenter.