
Je suis rarement déçu en lisant Elsa Dorlin : en tant que philosophe et historienne des sciences, elle propose des approches éclairantes et nouvelles avec des fondements très documentés et argumentés. Là, elle s’attaque à la manière dont sexisme et racisme se sont construits ensemble, en se basant sur les évolutions du discours médical sur les femmes (ce qui inclut la médecine féminine mais pas que) et ensuite sur le discours médical sur les populations colonisées et les esclaves a partir de la Traite. Et sa démonstration est brillante et solide, en se focalisant sur les moments de remise en cause et de recomposition des discours de justification de la domination. C’est non seulement passionnant en soi mais aussi pour ce qu’il reste de tout ça dans les manières de penser (et de parler) aujourd’hui. Ça donne du grain à moudre sur les liens entre dominations, pour le moins, et la manière dont ils font système. Sur la forme, c’est honnêtement dense mais découpé et lisible, et non sans un humour certain. J’ai vraiment aimé et j’ai plein de notes à reprendre.