On m’a souvent dit que Christine Delphy était brillante et importante mais jusque là ce que j’en avais lu m’avait semblé ardu et un peu chiant, bien que très pertinent. Grâce à ce livre, je peux dire clairement : brillante oui, importante oui aussi, je partage tout à fait. Il s’agit d’un recueil de textes écrits indépendamment mais traitant tous de la question de l’altérité et de la domination, dans une perspective matérialiste. En gros : comment en même temps on classe et on hiérarchise, sur la base d’une inégalité matérielle existante. D’où le sous-titre : Qui sont les autres ? Donc : celles et ceux qu’on a le pouvoir de classer et de constituer comme tel-les. Et tout cela est exposé de manière brillante et claire, avec de l’impact. Ce qui fait du bien et pose plein de questions importantes. D’autant plus qu’elle traite non seulement de sexisme, mais aussi de racisme et de rapports de classe (avec une grande attention à signaler les limites de son expertise) et de la manière dont ils font système et ont des mécanismes et des logiques qui se recoupent et se soutiennent. Ce n’est pas un essai ou une thèse globale mais c’est une passionnante démonstration de la manière dont une analyse matérialiste bien maniée s’attaque à un pannel de questions d’actualité sur ces thèmes. Donc, oui, c’est important. Et sans être forcément un bouquin pour débuter sur ces sujets, ça ne demande vraiment pas un bagage de spécialiste.