
Les années passant (treize, quand même, depuis le précédent), cet album devenait une sorte de serpent de mer dont on se demandait si il arriverait un jour, et si il ressemblerait encore vaguement au Tool que l’on connaissait. Et bien : oui, et oui (mais pas complètement non plus). Tool fait partie des groupes auxquels je suis très attaché. J’aime toujours énormément leurs premiers albums qui étaient très toniques, sombres et étranges. On y était dans un mélange entre du métal et une sensibilité artistique d’expérimentation. Les suivants se sont ralentis et ont vu le spirituel prendre plus de place : dans les textes, mais aussi dans les musiques, qui devenaient parfois assez mystiques. Et treize ans après, cette tendance a continué : c’est un album très mystique. Et très maîtrisé, je suis impressionné. Parce que faire fonctionner pleinement des chansons qui font toutes 15 minutes, ce n’est pas donné à tout le monde (en dessous de dix minutes, ici, c’est considéré comme un interlude). Avec des ambiances qui prennent le temps de se poser, parfois à la limite de la transe. Et toujours une richesse musicale impressionnante : un chanteur qui ne prend pas toute la place mais donc chaque intervention est pleine de force et d’émotion, un batteur polyrythmique incroyable, épaulé par un bassiste aussi efficace sur les rythmes que les mélodies, et un guitariste toujours alternant métal, bruits et mélodies. C’est une musique qui exige qu’on prenne le temps. Typiquement, j’ai voulu d’abord écouter des bouts vite fait pour me rendre compte et repérer les chansons qui allaient me plaire : ça ne marche pas du tout, il faut ralentir, écouter, se laisser faire un minimum pour rentrer dedans (ce qui est à contre-courant de l’époque et pas déplaisant par ailleurs). Mais en ce qui me concerne, ça fonctionne très très bien, parce qu’il y a une richesse de choses à écouter, parce que ça vous emmène ailleurs, parce que ce n’est pas plus anecdotique que tout ce qu’a fait Tool précédemment. C’est donc toujours du Tool, c’est un album qui m’impressionne et que je trouve très bon mais ce n’est pas pareil qu’avant : c’est treize ans plus loin, plus mûr, plus profond et plus étrange.