Cory Doctorow a travaillé longtemps au sein de l’EFF (Electronic Freedom Foundation) donc le fait qu’il parle de technologie de l’information de manière pointue et de liberté d’expression et de communication de manière engagée (et de liberté tout court d’ailleurs) n’est pas en soi surprenant. Qu’il le fasse par contre avec autant de talent en termes d’écriture et de narration, par contre, l’est plus, et sert admirablement les messages de fond de ce roman qu’on ne peut que qualifié d’engagé. Attention, engagé ne veut pas dire chiant, et comme je le disais, c’est au contraire très prenant et agréable à lire, avec une vraie histoire et du suspense. Mais fondamentalement, c’est une prolongation des réflexions de Huxley sur le basculement dans une société policière et ses mécanismes, notamment dans la tête des gens et dans le discours politique. Et c’est très actuel, puisqu’on parle des Etats-Unis d’aujourd’hui (enfin, d’un hier très proche, mais de là à dire que ce n’est plus d’actualité…), avec guerre en Irak en toile de fond et Département de la Sécurité Intérieure en protagoniste principal. On y suit les aventures d’un lycéen, hacker, que les circonstances vont amener à réaliser que sa ville (San Francisco) devient un état policier sous couvert de protéger le pays contre le terrorisme, et qui va choisir de s’y opposer. C’est terriblement crédible, c’est prenant et engagé, c’est presque didactique dans la construction et le lien fait avec tous les mouvements pour les droits civiques, bref, c’est un roman très bien foutu sur des contenus absolument essentiels. Avec, en prime, une bien belle bibliographie et des annexes importantes. J’essayais Doctorow suite à des échos lointains mais positifs et honnêtement, c’est une découverte marquante et importante.
Little Brother, de Cory Doctorow.
